Cela faisait un bon moment déjà qu’elle songeait au plus beau cadeau qu’elle pourrait lui faire. Elle n’avait pas souvent l’occasion de le voir, seul Internet leur permettait une réunion. Les milliers de kilomètres qui les séparaient ne facilitaient pas leur rapprochement.
Leur amour était au paroxysme de la passion. Cela faisait maintenant plusieurs années qu’ils s’aimaient, mais ils n’avaient pu se rencontrer que quatre ou cinq fois seulement. Mais à chaque fois, leur rencontre était un moment idyllique. La passion prenait le dessus sur tout et leur fusion était des plus intense.
Ils avaient une connivence et une complicité, à toute épreuve, dans tous les domaines. Ils passaient de longues heures à discuter et à s’écrire. Jamais ils ne se lassaient de dialoguer grâce à Internet. Tout y passait, l’actualité, les arts, le travail, le sexe, la politique, le sport… Il n’y avait aucun sujet tabou, tous pouvaient être abordés sans que jamais ils n’entachent leur relation. Alors dès qu’ils se retrouvaient tous les deux, leurs fantasmes prenaient le dessus. Le désir les prenait d’une telle force qu’il ne les quittait plus pendant des jours. Et chaque pas, chaque instant, chaque mot, étaient une danse sensuelle qui les unissait.
Mais en ce moment, Karine et Christian ne prévoyaient pas de se retrouver avant longtemps. Bientôt la période des vacances arrivait et ils allaient avoir une longue coupure de plusieurs semaines avant de pouvoir à nouveau se connecter. Ainsi, comme chaque année à cette période, Karine envisageait de lui envoyer un cadeau virtuel. Un cadeau qui pourrait animer son inspiration créatrice. Cela faisait plusieurs semaines qu’elle y songeait, et cette fois-ci, tout était clair dans son esprit. Elle allait enfin pouvoir le réaliser. Elle était prête.
C’est ainsi qu’en cette fraîche soirée de début juin, Karine se préparait à organiser le cadeau qu’elle ferait à Christian. Elle avait refait son ameublement, il y avait de cela quelques mois et en avait profité pour changer sa chambre à coucher. Elle rêvait depuis son enfance d’un lit à baldaquin et elle s’en était offert un avec le cadre métallique noir. Le tout recouvert d’un long voilage blanc qui tombait de chaque côté de la structure. Elle avait, sur les quatre pans, cintré le voilage par une fine cordelette rouge, ce qui était d’un très bel effet exotique. Elle s’était également procuré 5 caméras numériques qu’elle avait disposées tout autour du lit centré dans la pièce. Une caméra positionnée face aux quatre côtés du lit et la cinquième suspendue au plafond du baldaquin permettant ainsi de ne rater aucune prise de vue de ses mouvements. Elle avait paramétré les caméras de façon à ce qu’elles se déclenchent au moindre mouvement qu’il y avait dans leur champ de vision. Ce soir c’est la première fois qu’elle les mettrait en route. Elle n’avait jusqu’à maintenant fait que vérifier leur bon fonctionnement et surtout leur bon positionnement. Tout était parfait. Elle se réjouissait déjà de ce qu’elle allait lui donner.
Pour se détendre au mieux, elle prit un bain d’huile aux senteurs de monoï. Ce parfum avait le don de les plonger dans des délires exotiques. Il était, sans aucun doute, un puissant aphrodisiaque. Après s’être parfumée et s’être vêtue d’un des déshabillés que Christian lui avait offert, Karine se mit à se cuisiner un petit délice. Elle voulait être en excellente forme pour son cadeau et avait prévu d’arroser son dîner de quelques gouttes de Champagne.
Alors qu’elle s’affairait, la sonnette retentit. Elle pose son œil devant le judas et ouvre à Nathanaëlle. Nathanaëlle est son amie depuis de nombreuses années. Elle est sa confidente. L’amie à qui elle peut tout confier sans craindre d’être jugée. Nathanaëlle n’est pas en pleine forme depuis quelques jours et elle est venue chercher le réconfort chez sa meilleure amie. Qui mieux que Karine peut la consoler ?
Karine sur le moment se dit que le cadeau de Christian sera pour une prochaine fois. Après tout si Natha est venue ce soir, c’est qu’elle en a réellement besoin. Elle n’est pas du genre à s’incruster chez les copines sans bonne raison. Du coup, Karine décide de partager son dîner. C’est donc entre filles que débute la soirée. Pendant tout le repas Nathanaëlle s’épanche sur sa rupture. Elle en a gros sur le cœur et n’a pas le courage de passer la soirée toute seule. La discussion aidant, la bouteille de Champagne se vide, faisant place à un Chassagne-Montrachet…
Les effets de l’alcool se font ressentir et Karine demande à son amie de rester dormir là. Après tout, son lit est suffisamment grand pour y abriter trois personnes donc à elles deux, elles ne vont pas se gêner. Nathanaëlle accepte bien volontiers, ne se sentant pas d’attaque pour reprendre la route dans cet état. C’est sous la douche qu’elles se dirigent l’une et l’autre pour se détendre avant d’aller se coucher. Rien de tel qu’une bonne douche pour remettre ses idées en place. Mais alors que Karine est en train de se savonner, son amie la rejoint. « Ce n’est pourtant pas l’habitude de Natha ! » s’étonne Karine. Mais elle n’ose le lui faire remarquer et la laisse se glisser aussi sous la douche, lui faisant un peu de place à ses côtés. C’est alors que sans aucune pudeur Natha prend de la mousse dans ses mains et parcoure tout le corps de Karine. Karine se sent tout d’abord gênée et pense que les gestes de son amie ne sont dus qu’aux effets de l’alcool, elle qui n’est pas habituée à boire ! Puis ses caresses commencent à se faire plus insistantes sur certaines parties de son corps. Karine n’ose plus bouger…, elle est partagée entre la nécessité de faire cesser les caresses de Nathanaëlle et son désir qu’elle continue. Ses mains sont si douces ! Elles se font tellement câlines ! Tendres ! Chaudes ! Expertes… que Karine finit par succomber à son désir. Elle laisse les mains dessiner son corps, découvrir chaque parcelle de sa peau. Elle les laisse courtiser tout doucement la rondeur de ses fesses, et effleurer ses lèvres…
Karine sent tout à coup le désir monter. Un désir intenable. Elle n’en peut plus mais se dit qu’elle ne peut pas continuer ainsi. Elle prend délicatement les mains de sa meilleure amie dans les siennes, leur dépose un tendre baiser au creux de la paume, puis reprend le pommeau de la douche pour terminer sa toilette. Elle se savonne, savonne Nathanaëlle et l’une comme l’autre partent dans un jeu de moussage, d’aspersion… et c’est dans des éclats de rire qu’elles finissent par sortir de la salle de bains.
Une fois dans la chambre, Karine prépare le lit. Elles se glissent alors sous la couette tout simplement. Nathanaëlle remercie Karine de la garder chez elle. Elle ne se sentait pas le courage de passer la nuit toute seule. Elle reparle de Paul, de leurs derniers moments, des cris, des effusions, puis se rappelle leur dernière nuit, si forte, si chaude, si puissante qu’elle en a encore les stigmates sur tout le corps. Elle y va de détails cuisants, n’omettant aucune scène, aucune émotion. C’est sans peine que Karine peut imaginer les ébats de ses amis. Mais pour l’heure, il lui faut consoler son amie dont les larmes ne cessent de ruisseler le long de ses joues. Karine prend alors son amie dans les bras, lui pose la tête sur sa poitrine et doucement lui caresse les cheveux. Elle ne pense plus à Christian. Ce soir elle n’a le cœur que pour Natha et les soins qu’elle peut lui prodiguer pour la consoler et lui permettre de se sortir de cette histoire indemne.
Après quelques minutes il semble que Nathanaëlle se soit un peu calmée. Elle ne bouge plus et apprécie tout simplement les caresses de son hôte. Puis voulant remercier Karine, elle se relève pour lui glisser un baiser tendre sur la joue. C’est alors que Karine la regarde droit dans les yeux, des yeux aussi noirs que l’ébène, des yeux emplis de larmes, des yeux si tendres, si profonds qu’on a envie de s’y plonger et de s’y perdre. C’est ce qu’elle fait et sans même réfléchir à ce qu’elle est entrain de faire, Karine pose ses lèvres sur celles de Nathanaëlle et lui offre le plus langoureux des baisers. Ses mains se mettent à glisser sur le corps de son amie, faisant tomber la nuisette qu’elle portait. Elle découvre sa peau douce et satinée. Un goût de miel envahit ses papilles. Elle ne peut plus s’arrêter. Elle n’a qu’une idée, aimer son amie. Lui donner tout l’amour et toute la douceur dont elle a besoin. C’est ainsi que ses mains laissent la place à ses lèvres. Elle parcourre, de tendres baisers, toutes les parties de son corps. Elle insiste sur sa poitrine généreuse. Sent le mamelon se durcir à son contact. Continue vers la cicatrice de sa naissance, et ne cesse de descendre plus tendrement encore, plus affamée aussi. Ses baisers se font de plus en plus puissants. Jusqu’à ce qu’elle touche sa toison noire. Si merveilleusement noire. Elle passe alors doucement sa main au travers de sa robe, entrouvre légèrement ses lèvres afin d’admirer le trésor qui s’y cache. Elle le voit, le caresse du bout du doigt puis l’embrasse du bout des lèvres. Jamais elle n’a ressenti un plaisir aussi intense à donner. Elle qui reçoit si souvent, aujourd’hui elle donne et le plaisir est partagé.
Elle lève les yeux et les plonge à nouveau dans ceux de son amie. Elle peut lire le désir partagé. Nathanaëlle en veut plus et ses yeux le lui disent bien…
Au petit matin lorsque Karine se réveille, elle découvre son amie dans le lit plongée dans un merveilleux rêve comme l’indique son sourire. Elles se sont ainsi aimées une bonne partie de la nuit. Chacune se donnant pleinement à l’autre. Chacune partageant ses fantasmes et ses orgasmes avec l’autre. Puis elles se sont endormies dans les bras l’une de l’autre, tendrement épuisées.
En pensant à la nuit qu’elle vient de passer Karine lève les yeux et voit l’objectif… C’est avec un merveilleux sourire qu’elle va faire le café…
Il l’aura son cadeau…
(Le sommeil de Courbet)